Décidément, ce COVID 19 bouscule tout, la moindre de nos certitudes. Il nous rapproche de la mort avec ces centaines de milliers de victimes dont plus de 11 000 en France. La compassion habituellement si intime devient collective.
Bien sûr, il y a le manque, celui des êtres disparus, le manque de soignant.es par le blocage du 'numerus clausus' depuis 1971, le manque de lits avec la suppression de 40% d’entre eux depuis cinquante ans. Et maintenant, la crainte de celui de médicaments par la délocalisation de la production par des groupes pharmaceutiques préoccupés par le profit. Toutes ces politiques auront épuisé notre confiance envers ceux qui savent et nous gouvernent.
Pire, ce virus aura révélé que le « tri des patients » qui choque tant aujourd’hui existait déjà du fait de l’absence de moyens. Qu’il existe entre les pays pauvres et riches.
Il est un autre sujet d’ordre philosophique et humain soulevé par le coronavirus qui nous renvoie à des années de politique de l’autruche : celui de la fin de vie. Le gouvernement vient par décret du 28 mars d’autoriser pour un temps la vente en pharmacie du « Rivotril intraveineux », qui permet d’éviter aux personnes agonisant en ville et dans les Ephad de mourir dans les souffrances cruelles de l’asphyxie. Rappelons que la loi Léonetti impose une hospitalisation pour le recours à la sédation profonde et continue.
Ce décret sonne comme une reconnaissance de l’Aide Médicale à Mourir. Ce que beaucoup réclament depuis longtemps, citoyens comme médecins. Sauf que la précipitation n’est jamais bonne conseillère et que ce décret guidé, je l’espère par l’éthique, pose au moins trois problèmes essentiels :
- Où est la collégialité nécessaire à cette décision quand le praticien est esseulé ?
- Où est le choix du malade ou de la personne de confiance ?
- Pourquoi limiter cette autorisation dans le temps, ce qui est humain en période de crise ne le serait-il plus ensuite ?
Une fois la pandémie éloignée, il nous faudra regarder autrement les problèmes de la maladie, de la souffrance, de la fin de vie. D’autant que 90% de la population réclament déjà une loi qui ferait des Directives anticipées un véritable testament laissant à chacun la liberté de choisir sa mort.
Pour cela, nous aurons besoin de ne rien oublier, ni des drames, ni des causes pour inventer un autre avenir.